Lecteur de rêve

Publié le par konda galner

Il y a peu, parcourant les journaux en ligne, et passant d'articles en articles, comme un somnambule déambule au hasard, je suis tombé sur une information qui m'a arrêté. Oh, certes, anodine en comparaison des drames humains qui sévissent en ce bas monde, et bien moins croustillante que les derniers écarts de la presse people qu'on étale à grands coups de rouleau compresseur, mais qui a provoqué une sorte d'effroi au niveau de mon sac de billes.

Il paraîtrait qu'au Japon, des chercheurs seraient sur une piste, et sur les préludes d'une méthode pour décrypter les rêves.

Pour ma part, bien que je considère comme une véritable calamité de ne pratiquement jamais me souvenir de mes rêves, cela pourrait être une délivrance. Alors que m'est interdit cet état transitoire au réveil, où les bribes de souvenirs des images du monde des songes restent encore, même floues, et laissent une impression étrange, cela serait même une bénédiction. Je me surprend même à rêver que je fais des cauchemards, juste pour ne pas sortir d'une nuit avec un sentiment de perte.

Pourtant, je prends ça comme un outrage, un viol. Non, je ne veux pas pouvoir consulter mes songes emprisonnés sur écran plasma entre la douche et le petit dejeuner, et que cela soit codé, crypté, comme un langage synaptique rationnel, et chimique. Qu'au contraire, il reste l'alchimie de cette terre encore vierge, préservée autant que possible malgré les volontés psychanalytiques qui rattachent une cuillère phosporescente en lévitation au traumatisme d'une bouillie trop chaude durant la petite enfance.

Et au delà de ça ? le commerce de rêve ? Avec une option Total Recall ? Une banque de données autour du monde, et l'accès direct à l'intimité des autres par le biais d'une simple clef usb ? Ce n'est pas tout a fait de cette façon là que j'imaginais le "dream work", avec le slogan qui ferait se retourner Marthin Luther King dans sa tombe "If you have a dream, change it for cash !" Un outil de suspicion et d'investigation, aussi bien en milieu conjugal que policier, où les couples, actuellement, déjà, fragilisés par l'air du temps, devrait même lorsqu'ils dorment ensemble se montrer patte blanche, et où un simple mandat permettrait à des inconnus en uniforme de visionner et d'interpréter les images d'une nuit agitée comme une pièce à conviction potentielle à présenter lors d'un procès pour, soit disant, définir le profil psychologique de l'accusé ?

Je fabule et je science-fictionne peut-être, certainement même, mais mon sac de bille me chuchotte tout bas, d'une voix tremblante qu'il ne veut pas être enfermé par Big Brother pour le motif de songe non-conforme.

Quitte à choisir, je préfère encore que personne, et pas même moi, ne connaisse mes rêves. Et si cela me manque, je demanderai à Morphée de venir faire une partie d'échecs lors de mes nuits sans sommeil, et j'écrirai alors mes rêves éveillés, en prenant dans un souffle nocturne l'inspiration d'une pensée venteuse et fugitive que mon inconscient me refuse, mon sac de billes rassuré et blotti contre moi.

Laissez passer les rêves, ils ne font que cotoyer notre dimension, et nous effleure d'un voile d'allégresse, de joie, de nostalgie, de colère ou d'interdit, en laissant juste une trace de leur passage. Certains mythes évoquent des créatures incontrôlables, tapies dans les profondeurs de notre inconscient, en explorer les abysses feraient naître à coup sur le croque-mitaine. L'incarnation dans une enveloppe charnelle des démons de l'humanité, déjà bien proches, sera t'elle le fait d'une science trop curieuse ?

Nous avons proclamé le droit de vivre, de s'exprimer, de différence, de croyance, et que sais je encore, faut-il coucher sur papier que nous avons aussi le droit de rêver ?

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F
Sache que c'est souvent la science qui ringardise la fiction. Non seulement on travaille à décripter les rêves, mais on s'essaie aussi à saisir la pensée consciente. C'est ainsi que lINRIA et d'autres planchent sur une nouvelle interface de contrôle des machines par détection directe de l'activité cérébrale.<br /> <br /> Et si je crois au pire c'est qu'il est peut-être probable. Reste cette chance bien singulière de ne guère attendre de l'avenir...
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K
<br /> Non seulement je suis au courant des tentatives de numérisation de la pensée, mais je souhaite aussi bien pour eux que pour moi même qu'ils n'y parviennent jamais...<br /> <br /> A revoir sur le dernier paragraphe du même article, celui qui se décode et révèle sans aucun doute possible la nature monstrueuse qui le caractèrise, celui là, que fait il ? :)<br /> <br /> <br />
D
Le seul droit qu'il nous reste, celui de rêver...
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C
heum...Ceci peut paraitre anodin...Un simple petit "heum" de rien du tout...Mais non, ce n'est pas un "petit rien du tout"!C'est une trace de mon passage! :DLa griffe d'une nana qui trip trop pour rassembler ses idées et sortir une bouffade qui aurait l'air à peu près suffisament intelligente pour exister! :DSur ce mon ami, je te liasse!
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K
<br /> Ca y est, elle a atteint le seuil de rêve permanent.....<br /> <br /> Par contre, pour me liasser, ne serre pas trop, j'ai la peau sensible....<br /> <br /> <br />