All lie in Wasteland

Publié le par konda galner

Il m’est arrivé une aventure étrange il y a peu. J’attendais en ce jour le signal d’une charmante créature avec laquelle je devais passer la soirée, et après m’être inquiété de son retard, j’ai appelé la belle qui m’annonçait désolée qu’elle ne pourrait pas venir. Déçu, j’ai donc suivi ce lapin en revenant dans mon terrier, et me servant un thé pour aider à laisser échapper ma folie, gambadant comme un lièvre un soir de Mars…

 

Alors que je m’installais à table pour savourer mon thé, j’ai posé la main sur un trousseau de clef que je ne n’arrivais pas à resituer. J’ai eu beau essayer toutes les serrures, repasser mes anciens lieux d’habitation, aucun ne correspondait. Je me suis dit alors qu’un ami avait du l’oublier à sa dernière visite, mais j’avais depuis la dernière fois, rangé, nettoyé la table intégralement, je les aurais forcément découvertes plusieurs fois. Je rangeais les clefs dans un tiroir de la commode en même temps que dans un recoin de mon esprit. Mon chat me regarde étrangement depuis l’autre côté de la pièce, avec ce sourire asymétrique et railleur. Toujours furtif et insaisissable.

 

En me dirigeant vers la cuisine, pour me servir un verre de jus d’orange, sur le plan de travail de la cuisine, j’aperçois un pendentif. Je le saisis, et le laisse pendre devant mes yeux.  Une simple cordelette portant un cercle de métal dans lequel se dessine les contours d’une chauve-souris.  Identique à celui qu’il y avait sur les bouteilles de Malibu, dans ma jeunesse… A mes 20 ans, je me rappelle en avoir confié un à une amie, en vacances. Un pendentif que j’avais porté tout l’été, et que je lui avais donné à la fin des vacances, parce que… Je savais que cela tournait une page, et que les étés suivants, cela ne serait plus pareil.

 

Mais qu’est ce que celui-là fait ici ? Ca en devient totalement absurde… Je reste, là, un instant à l’observer, et je vais le ranger dans le même tiroir où j’avais posé le trousseau de clefs… En ouvrant, je trouve un dessin sur une feuille jaunie. Il n’était pas là tout à l’heure, lorsque j’ai rangé le trousseau de clefs, j’en suis sur… Je le reconnais… Je l’avais fait… Pendant mes années de prépa, la couverture d’un livre de Tolkien, que j’avais reproduit. Je l’avais égaré… oublié… lors d’un de mes déménagements. Un des rares que j’avais conservé, parce que, au fil du temps, il ne me semblait pas si mal réalisé que ça.

 

Je commence à arpenter mon appartement, ouvrant les tiroirs et les placards, regardant chaque meuble dans chaque pièce, sous le regard oblique de mon chat… Un à un réapparaissent, vieux textes écrits et jamais achevés, carnets, lettres, bibelots, livres… Chacun avec une signification, issue de mon passé… Je pose toutes ces reliques de ma vie sur la table, et contemple mon passé, là, étalé devant moi. Je revois les visages, les lieux, les situations, les rencontres et les adieux, les larmes et les joies stigmatisées en un ensemble de babioles. Tout ce que j’ai laissé derrière moi, tout ce que je croyais perdu.

 

Parmi tout cet ensemble, un vieux carnet dans lequel j’avais noté mes contacts à l’époque, en insérant les lettres reçues, les mots écrits, les tickets de cinéma, aux noms de ceux qui m’accompagnaient. Pourquoi tous ces souvenirs me reviennent, là ? Et mes joies, mes peines, mes partages, mes espérances et mes amours, où sont ils, eux ? Pourquoi ne me sont ils pas rendu ? N’ai-je donc droit qu’a un cataplasme ? Juste avec un peu de sel pour aviver le tout ?

 

Rendez moi donc ma vie !

 

Immobile, mon chat m’observe encore, assis, à distance, parfois clignant ses grands yeux verts comme si tout cela était un jeu de son fait, et qu’il se repaissait du spectacle. Peu à peu, tout s’éclaire. Je n’ai rien perdu, j’ai juste oublié, et mis de côté. Je suis au WasteLand… Là où tout ce que nous avons refusé, ce que nous avons laissé atterrit… Alors pourquoi ne pas retrouver aussi certains de mes amours, et mes rêves, mon espérance, ma confiance, et ma fierté ? Vu que je les avais gâchés de la même manière, ils devraient être ici !

 

Mon chat se lèche la patte alors que je m’interroge. Et que je comprends pourquoi. Au fil de ses années où je suis resté isolé, où je me suis éloigné de tout ça, je n’ai rien perdu, j’ai juste mis à l’écart… Et ce qui ne se trouve pas ici, c’est simplement parce que cela n’a jamais existé.

 

Au final, rien ne se perd, il n’existe que l’illusion de la perte, ou le rêve d’avoir eu. Rien ne se transforme, tout se conserve… Je récupère mon vieux carnet, et je prends mon GSM en main, pour retisser ces liens que j’avais laissés en dépôt…

 

Et mon chat semble sourire lorsqu’il fait demi tour, et s’éloigne…

Publié dans histoires courtes

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